Depuis quelques temps, le CAUE de la Martinique est sollicité pour des demandes d’informations de particuliers, concernant la Redevance d’Archéologie Préventive (RAP), qu’ils ont à payer suite à la délivrance d’un permis de construire ou d’une déclaration préalable… Afin de mieux faire connaître cette taxe, qui concerne depuis janvier 2013 les particuliers qui construisent une maison individuelle, nous définirons dans ce qui suit ce qu’est l’archéologie préventive, puis nous aborderons ses modalités d’application.
Qu’est-ce que l’archéologie préventive ?
L’archéologie préventive fait partie intégrante de l’archéologie. Elle a pour objet d’assurer – quel que soit le milieu (terrestre ou aquatique) – la détection, la conservation ou la sauvegarde par l’étude scientifique des éléments du patrimoine archéologique affectés ou susceptibles d’être affectés par les travaux publics ou privés concourant à l’aménagement. Elle a également pour objet l’interprétation et la diffusion des résultats obtenus. Elle relève de missions de service public. Elle peut impliquer la mise en œuvre de diagnostics archéologiques (sondages), de fouilles (fouilles de sauvetage ou fouilles préventives) et dans certains cas, des mesures de sauvegarde.
Historique
L’expression « archéologie préventive » aurait été employée pour la première fois en 1979 par jacques Lasfargues, directeur des antiquités historiques de la région Rhône-Alpes, alors que cette activité s’est développée en France à partir des années 1970, à la faveur de la multiplication des grands travaux d’aménagements (autoroutes, voies ferrées, etc.). Le décret n°86-192 du 5 février 1986 va généraliser la réalisation des fouilles préventives, grâce à la consultation des conservateurs régionaux de l’archéologie sur tout permis de construire, prévoyant un affouillement dans une zone de risques archéologiques. Dite « de sauvetage », faute d’assise légale jusqu’en 2001, cette activité est désormais définie comme « préventive » depuis la promulgation de la loi sur l’archéologie préventive du 17 janvier 2001.
Cette loi a instauré une redevance pour financer les diagnostics et les fouilles d’archéologie préventive et prévu la création d’un établissement public administratif de recherche, qui a été mis en place le 1er février 2002. Il s’agit de l’Inrap, l’Institut national de recherches archéologiques préventives.
Cette loi prévoit l’intervention des archéologues en préalable au chantier d’aménagement pour effectuer un « diagnostic » et, si nécessaire, une fouille.
• Le diagnostic permet, par des études, prospections ou travaux de terrain, de mettre en évidence et de caractériser les éléments du patrimoine archéologique présents sur l’emprise d’un projet d’aménagement, les résultats étant publiés dans un rapport.
• La fouille préventive quant à elle vise à recueillir les données archéologiques présentes sur le site, à en faire l’analyse, à en assurer la compréhension et à présenter l’ensemble des résultats dans un rapport.
Depuis la loi du 1er août 2003, les aménageurs ont le droit de choisir leur opérateur de fouilles (Inrap, services territoriaux agréés, sociétés privées, structures associatives, etc.).
Des structures de droit public ou privé peuvent demander à l’Etat un agrément pour être habilitées à réaliser la phase de fouille. Quant aux diagnostics, ils ne peuvent être réalisés que par l’Inrap ou les services archéologiques agréés des collectivités locales.
Sur la base des prescriptions de l’État, l’aménageur, maître d’ouvrage de la fouille, choisit l’opérateur et signe avec lui un contrat qui intègre le projet scientifique d’intervention et les conditions de sa mise en œuvre (coûts, délais…).
Le financement de l’archéologie préventive repose sur les aménageurs, tandis que le mode de financement diffère selon qu’il s’agit de diagnostics ou de fouilles.
Modalités d’application de la RAP
La redevance d’archéologie préventive (RAP) est due par toute personne publique ou privée qui projette de réaliser des travaux affectant le sous-sol et qui, selon les cas :
– sont soumis à une autorisation ou à une déclaration préalable en application du Code de l’urbanisme. Depuis le 1er mars 2012, la Redevance d’Archéologie Préventive est exigible pour les travaux soumis à permis de construire ou à une déclaration préalable (article L. 524-2 du code du patrimoine) déposés à compter du 1er mars 2012 et pour les maisons d’habitation individuelles des particuliers construisant pour eux-mêmes, pour les dossiers déposés à compter du 1er janvier 2013 ;
– donnent lieu à une étude d’impact en application du Code de l’environnement ;
– constituent des travaux d’affouillement et sont soumis à une déclaration administrative préalable auprès du préfet de région.
Son produit est reversé au Fonds national pour l’archéologie préventive (Fnap) et à l’Institut national de recherches archéologiques préventives.
Une part du produit de cette redevance finance les opérateurs chargés de la réalisation des diagnostics.
Le financement des fouilles repose quant à lui sur le paiement du prix de la prestation, fixé par contrat entre l’aménageur et l’opérateur. Dans certains cas, l’aménageur peut bénéficier d’une aide financière du Fonds national pour l’archéologie préventive (Fnap). Ce fonds permet, à certaines conditions, de financer des opérations de fouille en fonction de la nature et de la destination des projets d’aménagement.
Exigibilité
La redevance d’archéologie préventive doit être versée, qu’il y ait fouille ou non, pour les travaux ou aménagements :
– ayant un impact sur le sous-sol (fondations d’une profondeur supérieure à 50 cm) et soumis à autorisation ou déclaration préalable, qui créent plus de 5 m² de surface de plancher ou d’emprise au sol
– ou donnant lieu à une étude d’impact (carrières, routes, voies ferrées,
canaux par exemple), dont la surface au sol (unité foncière) est supérieure à 3 000 m².
La RAP est exigible à la date :
– de la délivrance de l’autorisation de construire ou d’aménager, ou du permis modificatif,
– de la naissance d’une autorisation tacite de construire ou d’aménager,
– de la décision de non-opposition à une déclaration préalable,
– du procès-verbal constatant l’achèvement de constructions réalisées sans autorisation ou en infraction (taxation d’office),
– pour les travaux donnant lieu à une étude d’impact, à l’exception des zones d’aménagement concerté, l’acte qui décide, éventuellement après enquête publique, la réalisation du projet et en détermine l’emprise,
– pour les autres travaux d’affouillement, le dépôt de la déclaration administrative préalable.
Travaux exonérés de la RAP
Certains aménagements et constructions sont exonérés de la redevance :
– constructions dont la surface est inférieure ou égale à 5 m² ;
– travaux concernant les logements locatifs construits ou améliorés avec le concours financier de l’État, logement sociaux ou habitations à loyers modérés (HLM),
– travaux n’affectant pas le sous-sol : surélévation d’un bâtiment existant, emplacement sans fondation (emplacement de tente, caravane et résidence mobile de loisirs sur un terrain de camping, panneau photovoltaïque fixé au sol, aire de stationnement extérieure…),
– travaux agricoles et forestiers, locaux agricoles (serres, locaux de production et de stockage des récoltes et des matériels, centres équestres, etc.),
– bâtiments affectés à un service public,
– bâtiment détruit ou démoli depuis moins de 10 ans, reconstruit à l’identique.
Lorsque l’emprise des constructions a déjà fait l’objet d’une opération archéologique, la RAP n’est pas due.
Lors du dépôt de la demande d’autorisation d’urbanisme, la personne qui projette de réaliser des travaux exonérés doit joindre au dossier les éléments justifiant l’exonération.
Des exonérations peuvent être votées par la commune (pour les bénéficiaires d’un PTZ+ notamment).
Surface taxable
La surface, qui sert de base de calcul à la taxe, correspond à la somme des surfaces au sol de chaque niveau, closes et couvertes, sous une hauteur de plafond supérieure à 1,80 m, comprenant des fondations (travaux affectant le sous-sol), calculée à partir du nu intérieur des façades, après déduction :
– de l’épaisseur des murs qui donnent sur l’extérieur,
– des trémies des escaliers et ascenseurs.
Constituent donc de la surface taxable :
– tous les bâtiments (y compris combles, cellier, cave, garage, dès lors qu’ils dépassent 1,80 m de hauteur sous plafond),
– ainsi que leurs annexes (abri de jardin notamment).
Un bâtiment non clos (ouvert sur l’extérieur avec une cloison de façade en moins, pergola ou tonnelle par exemple) ou une installation découverte (terrasse ou emplacement de stationnement extérieur par exemple) n’est pas compris dans la surface taxable. Par contre, une véranda couverte et close comprenant des fondations est taxable.
Certains ouvrages exclus de la surface taxable (piscine découverte, par exemple), sont cependant soumis à la taxe de façon forfaitaire.
Calcul de la redevance
La RAP est calculée selon la nature des travaux :
– par le préfet du département, la direction départementale des territoires (DDT ou DDTM) ou par le maire dans le cas des travaux soumis à autorisation ou déclaration préalable,
– par le préfet de région ou la direction régionale des affaires culturelles (Drac) pour les autres travaux.
Pour les projets soumis à autorisation (permis de construire ou d’aménager…) ou déclaration, le taux de la redevance correspond à 0,40 % de la valeur forfaitaire de l’ensemble immobilier, qui est actualisée chaque année.
Le taux appliqué comporte 2 décimales après la virgule. La valeur est arrondie au centième d’euro le plus proche, la fraction égale à 0,005 étant comptée pour 0,01. Le total de la taxe est arrondi à l’euro le plus proche.
Comme en matière de taxe d’aménagement, un abattement de 50 % est applicable sur la valeur forfaitaire pour les 100 premiers m² d’une résidence principale, pour les organismes HLM et pour les constructions abritant des activités économiques.
Pour une piscine découverte, la valeur forfaitaire est de 200 € par m² de bassin.
Paiement de la redevance
Un avis d’imposition est envoyé par la direction départementale (ou régionale) des finances publiques (DDFIP ou DRFIP) au redevable environ 12 mois après la délivrance de l’autorisation d’urbanisme.
La RAP doit être payée avant la fin du mois suivant l’émission de l’avis d’imposition, en une seule échéance, sauf dans certains cas autorisant plusieurs versements (par exemple, travaux par tranches).
La redevance est indépendante de l’avancée des travaux. Elle est due même si les travaux ne sont pas achevés.
Cependant, si le projet est abandonné, il est possible d’obtenir la décharge de la RAP en renonçant à l’autorisation d’urbanisme. Il est alors nécessaire de contacter la commune afin d’obtenir un arrêté constatant l’abandon de projet, qu’il faut ensuite envoyer à la direction départementale des territoires (DDT).